mercredi 9 mars 2011

Le Premier Mot de Vassilis Alexakis, Stock, septembre 2010

Quel fut le premier mot prononcé par l’humanité ? C’est la question que se pose Miltiadis, professeur de littérature comparée français-grec ; mais il meurt avant de le découvrir. Sa sœur reprend donc l’enquête, rencontrant de nombreux spécialistes entre Paris et Athènes, découvrant des langues et des mots nouveaux. A travers cette quête, elle maintient le lien qui l’unissait à son frère et espère tenir sa promesse : lui révéler le premier mot.

Dans ce roman, Vassilis Alexakis renoue avec son amour des mots et des langues déjà à l’œuvre dans La Langue maternelle (prix Médicis en 1995) et Les Mots étrangers. Il offre un récit foisonnant qui regorge d’anecdotes linguistiques, entre approfondissement du français et découverte de langues étrangères – le mot « papillon » se dit faracha en arabe, mariposa en espagnol, pinpirin en basque etc. Cette richesse peut être vue comme un étalage d’érudition de la part de l’auteur mais cette enquête sur les mots, menée par la narratrice qui n’est pas une experte linguistique, nous rappelle que cela peut devenir l’affaire de tous surtout lorsqu’elle se fait sur le mode ludique : « Ne croyez pas que j’aie oublié votre intérêt pour le r. J’ai essayé de deviner pourquoi vous aviez si mauvaise opinion de cette lettre. Je me suis remémoré divers personnages historiques qui auraient pu la marquer par leurs actions funestes, Robespierre, Raspoutine, Ravaillac, le cardinal de Richelieu. (…) Mais il existe aussi des personnages tout à fait sympathiques dont le nom commence par un r, comme Robinson Crusoé et Robin des Bois. » (p. 336)

En plus de la dimension linguistique, ce roman développe une réflexion sur l’absence et comment vivre le manque après la perte d’un être cher. Loin de tomber dans le pathétique, Alexakis revivifie le lien toujours existant entre les vivants et les morts grâce à la mémoire, aux souvenirs et aux promesses faites. Ainsi c’est pour ne pas perdre définitivement Miltiadis que sa sœur reprend l’enquête qui lui tenait à cœur : « Je souhaite en somme, comme je n’ai pas trouvé le premier mot, ne jamais trouver le dernier non plus. » (p. 459)

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