mercredi 2 mars 2011

Sans amour, Pierre Pachet, éditions Denoël, février 2011.

« Quand on a cessé de plaire à quelqu’un »… Ainsi s’ouvre le récit de Pierre Pachet, universitaire, essayiste et écrivain.
Que devient la femme vieillissante, dont les attraits ont fanés ? L’ambition de l’auteur est de faire basculer son regard, d’aller chercher le désir au-delà d’un corps usé, de voir la femme derrière la dame.
Irène, Mania, Mizou… Autant de portraits qui réveillent et révèlent des femmes d’un temps passé. Ces émigrées russes, juives, sous l’Occupation ou à la fin des années cinquante, ont toutes en commun un rapport au corps que Pachet suit d’un regard tendre.
Pierre Pachet observe la féminité libérée ou complexée, à travers un filtre presque documentaire. En effet, c’est une histoire de femmes, mais de contextes aussi. Chacune porte le poids de son origine, de son identité, de sa sexualité. Qu’elles aient été amantes ou amies, c’est plein d’une humilité salvatrice que l’auteur contemple ces femmes et assied sa réflexion. Quoi de plus épineux pour un homme que de parler des femmes délaissées par leurs propres corps ?
Sans jamais tomber dans une généralisation vulgaire et absconse, il analyse leur retranchement dans la solitude ou leur renoncement à l’amour. Ces tendances arrivent alors que le corps doucement se meure, et, paradoxalement, loin d’être mortifères, elles sont la preuve de leur désir de paix.
Irène, mutique quand vient le temps du premier soutien-gorge, terrifiée quand vient celui de partager sa couche, vit une première expérience sensuelle alors qu’elle approche de la fin de sa vie : elle se laisse toucher les cheveux. Mais « elle ne se sent pas assez sûre d’elle-même pour s’offrir ainsi, non pas tant à autrui qu’à ce qui vient d’elle et qui lui échappe  ».
Sans amour, titre à la fois triste et beau, souligne avant tout la complexité du rapport des femmes à leurs corps, lourds d’une volupté écrasante. Sans amour d’elles, habitées d'un désir qui leur semble impur, Pachet ne leur reproche rien, et, au contraire, admire leur force de vie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire